Le
08 juillet 2020
Jean-Luc
Hau
De
réformes en réformes, les institutions françaises ont centralisé
les pouvoirs à Paris, alors qu’on ne parle que de
décentralisations depuis Gaston Defferre, mais qui en fait ne sont
que des délégations toujours plus cloisonnées, surtout depuis la
dernière réforme constituant les supers Régions.
La
décentralisation que nous connaissons aujourd’hui n’est pas
celle imaginée par le Général de Gaulle dans son ultime réforme
de 1969, qui avait pour objet de laisser parler les territoires
directement et de permettre à la subsidiarité de s’épanouir dans
le concert du pouvoir, afin que la loi soit la plus adaptée aux
territoires et permettre une application plus rapide, sans pour
autant devoir l’adapter dans des décrets d’application ou des
circulaires qui sont rédigés de manière non démocratique par des
hauts-fonctionnaires dénués d’attachements vitaux régionaux.
La
substance même de cette réforme d’envergure, mal comprise à
l’époque avait pour objet de nourrir le pouvoir régalien par le
bon sens et la vie du Peuple.
Depuis
2008 et la réforme de l’Assemblée Nationale, la prise de pouvoir
des groupes parlementaires a réduit à néant, la liberté de
conscience et politique de chaque député, qui se voit asservir à
un groupe qui pense pour lui. Ce changement radical de paradigme est
pourtant salutaire pour asseoir la stabilité institutionnelle de
notre pays, tout comme le quinquennat qui favorise l’émergence
d’une majorité présidentielle mais qui réduit la place du
parlementaire par rapport au présidentialisme, qui s’aggrave de
gouvernements en gouvernements – Le Président grignotant les
prérogatives désormais même du Premier Ministre.
La
pensée unique d’un parti, cette dictature qui a entravé le bon
fonctionnement de la 4ème République et déjà dénoncé par le
Général de Gaulle en 1946 dans son discours de Bayeux, est de
nouveau une réalité.
Le
Sénat doit former un véritable contre-pouvoir, celui de la
représentation nationale territoriale.
Les
régions françaises originelles, pas celles créées
artificiellement aujourd’hui sous le gouvernement Hollande,
possèdent des spécificités géographiques, démographiques,
culturelles, géologiques, industrielles qui leur sont propres. Le
Général de Gaulle l’avait bien compris. La réforme de la
décentralisation voulue en 1969 avait pour but de capter la richesse
du vécu de la cité, de la monter à Paris, au sein du Sénat afin
qu’elle adapte aux spécificités et aux réalités du terrain, les
propositions et projets de loi votés à l’Assemblée Nationale.
Il
est temps pour le Sénat de retrouver son essence même, sa valeur
propre, son intérêt majeur pour nous adapter aux changements. La
crise du coronavirus, la crise économique, la crise mondialiste, la
crise géopolitique, la crise de peuplement, la désertification, la
désindustrialisation, toutes les crises ne trouveront pas de
réponses dans des commissions parisiennes, dans des cercles
d’analyse trop proches du pouvoir, mais spécifiquement dans
l’analyse et l’action des politiques locales et du Peuple
Français.
La
régionalisation du Sénat avec une structure quadricéphale la
constituant permettrait de recueillir le plus possible d’éléments
subsidiaires. Cette structure constituée en partie de sénateurs
élus de grands électeurs municipaux, de sénateurs élus par les
conseillers régionaux, de sénateurs élus par les conseillers
départementaux, de sénateurs élus par le CESER permettrait
d’assurer une représentativité telle que la vision de tous les
composants subsidiaires des territoires soit représentée.
Les
sénateurs doivent pouvoir garder leur esprit critique et ne pas se
rassembler en groupe parlementaire qui asphyxie la liberté d’action
et de représentation. La richesse des apports individuels nourrira
le débat démocratique de cette chambre défendant les territoires
et la spécificité organisationnelle des régions, départements,
communes et corps intermédiaires.
Ainsi,
le Sénat retrouvera sa place centrale qui lui revient, une place de
choix chez les élus de terrains et sera l’élément moteur du
redressement national.